Un de mes clients venait d’être nommé finaliste pour le prestigieux Prix de l’entrepreneur de l’année dans sa catégorie pour le Québec.
Vers 22:00 le jour de la remise des prix, je reçois un message texte de ma collègue me disant que mon client venait de gagner. Cette bonne nouvelle m’a rempli d’une vague de fierté. Je supporte de tout cœur le succès de mes clients.
La fierté : moteur du leader
C’est important pour le leader de célébrer ses succès et ses victoires, surtout quand il est fondateur et chef d’entreprise. Un prix tel que celui que mon client venait de remporter était une confirmation par autrui qu’il faisait du bon travail. C’est important parce qu’un gestionnaire peut se sentir seul dans sa position de pouvoir et donc vivre des doutes sur ses décisions. On venait donc de reconnaître ses années d’investissement personnel dans un projet qui crée des emplois, satisfait des clients et rapporte de l’argent.
Gagner ce prix et célébrer cette victoire sont une opportunité unique de rayonner. C’est important de rayonner à l’extérieur de l’entreprise, mais aussi à l’intérieur. C’est une occasion de répandre l’énergie positive du gagnant au sein de l’entreprise.
Le défi du coach : maintenir la victoire
En tant que coach, j’ai l’habitude de coacher des entrepreneurs, des chefs d’entreprise et des gestionnaires qui ont réussi, des gens qui se trouvent là parce qu’ils sont des gagnants. Les gens que je coache sont habitués à connaître du succès, mais être reconnus plus globalement vient augmenter leur confiance.
Vers 23:00, je suis encore excité par la victoire de mon client, mais je sens que quelque chose m’empêche de célébrer pleinement. Ma fierté est doublée d’un sentiment ambigu que je cherche à comprendre.
Je commence à me poser des questions troublantes : Comment coacher le meilleur entrepreneur du Québec dans sa catégorie? Comment est-ce que je vais faire, en tant que coach, pour le soutenir dans son succès? Comment est-ce que je vais faire pour le mettre en garde contre les pièges qui guettent quiconque connaît un immense succès — des pièges tels que la démesure? Ce sont ces questions qui m’empêchent de célébrer pleinement. Le succès n’est jamais final. Il vient toujours avec de nouveaux défis, plus grands que les précédents.
Mon nouveau défi en tant que coach sera de m’assurer que mon client, dans son ascension fulgurante, n’en vienne pas à se retrouver isolé dans les hauteurs qu’il aura atteintes. Les champions tels que lui sont très performants; ils avancent beaucoup plus vite que la majorité des gens. Mais dans le contexte d’une entreprise, le champion ne gagne pas seul : il a besoin des autres autant que les autres ont besoin de lui. Voici le nœud du défi qui nous attend : comment continuer à performer comme un champion qui amène du succès aux siens sans prendre trop d’avance sur eux? Autrement dit : comment maintenir un rythme de croissance qui soit vigoureux mais que les supporters arriveront à suivre?
Le plus grand défi auquel est confronté un entrepreneur qui connaît un succès immense se situe au niveau de la relation. De la relation avec lui-même d’abord : comment rester humble malgré la fierté légitime d’avoir été reconnu comme le meilleur dans sa catégorie? De la relation avec ses supporters ensuite : comment rester empathique, compatissant et généreux avec les autres pour que ces derniers, eux aussi, gagnent en énergie, en confiance et en fierté?
Avoir remporté le prix du meilleur entrepreneur de l’année dans sa catégorie est une grande victoire pour mon client, mais aussi une opportunité de consolider la relation avec ses supporters, qui ont contribué à son succès. Une opportunité de créer un sentiment de puissance commun qui servira à énergiser les troupes lors de périodes plus difficiles.
Éléments de réponse
J’ai finalement trouvé la réponse à ma question en m’administrant moi-même mes méthodes d’intervention. Faire confiance au processus émergent de la théorie U et de la coconstruction. Réfléchir sur l’action avec une présence attentive et une lecture systémique des risques et opportunités qu’impliquent les décisions de gestion sur les talents. J’ai déjà les outils, mais ce sont surtout la présence à l’autre et l’attention aux contextes qui comptent.
C’est dans toutes ces questions et considérations que se situe mon défi en tant que coach. Comme les champions dans le domaine sportif, les champions dans le domaine de l’entrepreneuriat on aussi besoin d’un coach pour les soutenir. La fierté générée par la victoire de mon client ne doit pas occulter le fait que c’est à moi de m’assurer que ma présence en tant que coach continue de faire du sens.